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La place du renard dans les écosystèmes

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Dans ce volet, nous reviendrons sur le rôle du renard dans les écosystèmes. Cette espèce rend même des services inestimables pour la régulation des populations de rongeur et la réduction de certaines maladies.

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FOCUS SUR L’EVOLUTION DE LA BIODIVERSITE
EN FRANCE ET DANS LES HAUTES-ALPES

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Aucune indulgence pour ce scélérat
Qui vadrouille la nuit et s’en prend aux poules
Qui croque les faisans relâchés pour les chasseurs
Qui chasse le lapin de garenne et autres gibiers
Qui transporte des maladies…

Les rumeurs font le lit de la bêtise et l’ignorance favorise les rumeurs…


Dans cette partie :
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1. Bien connaître le renard

2. Le renard, un allié des agriculteurs


3. Déconstruire les préjugés vis-à-vis du renard qui justifient son classement “ESOD”

4. Revoir le statut du renard : l’exemple du Doubs

« La nature porte en elle toutes les réponses. L’homme est le seul être qui puisse faire en sorte que tout se casse la figure… » Jean-Michel BERTRAND

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Faudra-t-il, dans quelques années, se lamenter de la perte totale de la biodiversité et regretter notamment la disparition du renard qui rendait de grands services ?

Ouvrons les yeux, faisons preuve de bon sens, lisons les comptes-rendus scientifiques et écologiques et « utilisons l’intelligence du vivant » (François MOUTOU, vétérinaire, épidémiologiste et membre de la Société Française pour l’Etude et la Protection des Mammifères(SFEPM)).


1. Bien connaître le renard

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1. Connaissances générales

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Dans la famille du renard :

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A côté du Renard roux (Vulpes vulpes), on trouve le Renard polaire (Vulpes lagopus), le fennec (Vulpes zerda), le Renard famélique (Vulpes rueppellii), le Renard du Bengale (Vulpes bengalensis), le Renard du Tibet (Vulpes ferrilata), le Renard du Cap (Vulpes chama), le Renard corsac (Vulpes corsac), le Renard crabier (Cerdocyon thous), le Renard gris d’Amérique du Nord (Urocyon) et le Renard de Magellan (Pseudalopex culpaeus).


2. Le régime alimentaire du renard

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Pour traquer ses proies, le renard est doté :

  • d’un odorat très développé (400 fois plus que celui de l’homme) ;
  • de longues oreilles qui lui apportent une ouïe très fine (avec la technique du mulotage, le renard, grâce à son odorat et à son ouïe détecte le campagnol sous la terre et la neige) ;
  • d’une vision adaptée pour chasser la nuit et des moustaches très sensibles pour les passages étroits ;
  • d’une fourrure épaisse pour les rigueurs de l’hiver ;
  • d’une longue queue qui peut lui servir de balancier pour chasser (par exemple pour la « technique du mulotage »).

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Le renard est un opportuniste, son régime alimentaire varie en fonction des ressources disponibles :

  • micromammifères (souris, campagnols, rats, taupes…) : un renard mange entre 6000 et 10 000 rongeurs/an ;
  • lagomorphes (lièvres, lapins) ;
  • oiseaux, fruits et baies, insectes, vers de terre ;
  • animaux morts et placentas d’animaux.

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Omnivore, il a un appétit particulier pour les micromammifères, notamment le Campagnol des champs (Microtus arvalis) et le Campagnol terrestre (Arvicola terrestris), deux espèces pouvant causer des dégâts importants aux activités agricoles (cultures, vergers, prairies). Alain BARATON (responsable des jardins de Versailles) évoquait il y a peu sur France-Inter le rôle bénéfique des renards qui chassent les taupes dans le jardin du Trianon où ils sont protégés…
Parfois, on retrouve même le renard dans les poubelles… « Aucune espèce animale ne pullule si ce n’est quand on la gave », nous dit François MOUTOU.

En supprimant les espaces sauvages, les forêts, les haies, en laissant traîner des restes alimentaires et les dépouilles d’animaux d’élevage, le renard se rapproche de l’homme et les désagréments peuvent suivre.


2. Le renard, un allié des agriculteurs

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1. Un prédateur des rongeurs dont le rôle est encore peu connu

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En mangeant entre 6 000 et 10 000 rongeurs par an, le renard peut être considéré comme un véritable atout pour l’agriculture.

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En effet, si nous comptons 1 million de renards en France, on peut considérer que le renard chasse entre 6 et 10 milliards de rongeurs chaque année.

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Quels bénéfices pour l’agriculture ?

Le collectif Renard Doubs propose le devis suivant :
– on estime à 0,25 € le coût d’un campagnol/an pour un agriculteur en période de pullulation.
– sachant qu’un renard peut consommer jusqu’à 6 000 rongeurs/an.

Le montant du service rendu par un renard est donc de 1500 €/an (6 000×0,25).

Chaque année dans le Doubs, 4 000 renards sont tués (P.Feuvrier in Laurent, 2018).
Le préjudice porté à l’agriculture par l’abattage de ces 4 000 renards peut donc être évalué à 6 millions d’euros…

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Dans un article de 20 minutes du 18 juin 2020, Thierry CHALMIN, responsable de la commission faune sauvage de la FNSEA réaffirme le rôle du renard dans les champs pour prévenir les invasions de campagnols et assure que le regard des agriculteurs change peu à peu sur le goupil. Plus encore, il appelle à réfléchir à deux fois avant de classer le renard dans les espèces nuisibles dans tout l’Hexagone lors de la prochaine réactualisation de la liste en 2022.

Sur le sujet, voir aussi l’article du Dauphiné Libéré du 23 mars 2021 « Le retour dévastateur des campagnols ».

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Ces services rendus ne permettent malheureusement pas de reconnaissance du rôle essentiel du renard, qui continue à être classé parmi les ESOD dans une grande partie de notre territoire. Ce classement permet l’organisation de battues régulières, souvent sans argument scientifique pour les justifier.

Notons que dans les Hautes-Alpes, environ 1 000 renards sont tués chaque année et en France, on estime ce nombre à plus de 600 000, chasse et accidents compris !


2. L’utilisation de produits chimiques pour se débarrasser des rongeurs

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Que propose-t-on aux agriculteurs de France, aux arboriculteurs qui se plaignent de la présence dévastatrice de rongeurs de toutes sortes (campagnols, mulots, souris, rats…) ? Des produits chimiques…

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En Auvergne par exemple, le Rat taupier (campagnol terrestre) est l’ennemi public n°1 depuis le début de sa pullulation dans les années 1970. Il dévore quotidiennement son poids de racines. L’utilisation de la bromadiolone a été présentée comme la seule solution.
De la même façon, dans les départements des Alpes de Haute-Provence (04) et des Hautes-Alpes (05), FREDON (Organisme à vocation sanitaire), sous le contrôle de la DRAAF, proposait en décembre 2019 dans sa brochure « Plan Action-régional-campagnol » une lutte contre les campagnols avec la bromadiolone pour les vergers notamment.

A part quelques mises en garde sur la dangerosité du produit, aucune allusion n’y est faite concernant l’importance des haies et abris pour les prédateurs, sur le rôle régulateur des rapaces, renards et autres croqueurs de rongeurs pour peu que l’on se donne la peine de les accepter autour de soi pour une lutte non pas « raisonnée » mais vraiment écologique.

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On préfère donc à la prédation l’utilisation de produits très nocifs pour l’environnement.

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La bromadiolone est un puissant anticoagulant dont la dangerosité a été soulignée pendant des années par les associations de protection de la nature. Elle a un impact dévastateur sur les prédateurs des rongeurs comme les rapaces, les mustélidés, les renards et plus généralement sur l’environnement dans son ensemble à cause du ruissellement des eaux de pluie contaminées.

Depuis janvier 2021, la bromadiolone est interdite par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), suite à des directives européennes.

A la demande de la FNSEA, la Direction Régionale de l’Agriculture, de l’Alimentation et de la Forêt (DRAAF) vient de proposer un autre produit, le Ratron. Bien qu’autorisé par l’ANSES, ce produit est tout aussi toxique pour l’environnement et la faune prédatrice (y compris les lapins) et l’Association pour la Protection des Animaux Sauvages (ASPAS) dénonce ce nouveau coup porté à l’environnement.


3. La cohabitation du renard avec les autres animaux

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La question des poulaillers

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La rumeur de « chasseur de poules » colle bien au renard qui va de temps en temps courser une volaille échappée dans un pré non clôturé correctement. Jacques RIME l’écrivait ainsi : « le métier de renard est de vérifier chaque soir que les poulaillers sont bien fermés ». Il est donc impératif que l’éleveur protège son élevage, installe des portes et grillages solides, utilise l’aide d’un chien de défense comme cela se fait souvent dans les petites exploitations. Si vraiment le renard se montre persévérant, on peut comprendre que l’éleveur se défende lorsque toutes les mesures de protection et d’intimidation ont été mises en place.

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La question du gibier

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« En France, on élève à peu près, par an, 60 millions d’espèces gibiers dont un bon tiers est lâché par les chasseurs pour pouvoir les tuer. 20 à 25 millions de canards, de perdrix, de faisans, qui sont des animaux sortant de fermes, qui ne sont pas nés en nature, se trouvent dans des milieux très défavorables pour eux à cause de l’agriculture intensive… et on accuse les renards de les empêcher de s’installer !
Il n’y a plus de gibiers sauvages et on a rasé toutes les haies où la faune pouvait se cacher et s’abriter. Nous avons nettoyé toutes les plaines pour en faire de gigantesques champs de maïs, que nous traitons avec les pesticides qui éliminent tous les insectes dont se nourrissent les petits et jeunes oiseaux. Nous créons des milieux non favorables à la faune et nous sommes obligés de les repeupler tous les ans. C’est donc que ce n’est pas viable. Pourtant, on va accuser les renards. C’est plus simple que de remettre en cause le schéma agricole actuel et la politique agricole commune qui repose sur l’agrochimie, et l’agriculture intensive. »

Interview de François MOUTOU, dans le magasine Nouvelle veg’, novembre 2019.

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A propos des tétras-lyres et lagopèdes :

On accuse le renard d’être responsable de la diminution de ces oiseaux, sans se soucier des autres paramètres (réchauffement climatique, pression humaine dont la chasse, activités humaines et sportives en montagne, morcellement de leur habitat, câbles des remontées mécaniques, lignes électriques…). Or le Tétras-lyre et le Lagopède alpin sont deux espèces chassées.

Le Conseil Scientifique Régional du Patrimoine Naturel de la région PACA (CSRPN) en septembre 2020 avait d’ailleurs fait part de son incompréhension sur l’autorisation ministérielle de la chasse du lagopède au détriment d’une espèce menacée et alors qu’à l’unanimité la motion d’arrêt de toute chasse avait été votée.

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La régression du lièvre, du faisan et de la perdrix grise n’est pas non plus l’œuvre du renard

Même si le renard ne rechigne pas si un lièvre passe sous ses moustaches, la principale cause de la régression de ces espèces est la transformation des écosystèmes due à l’intensification de l’agriculture (Mayot et al., 2009) qui se traduit par une uniformisation des paysages (disparition des haies et des friches), le retournement des prairies, l’usage important de produits phytosanitaires. En France, Olivier MASTAIN (Mastain et al., 2011) rapporte de nombreux cas de mortalité de perdrix et de diverses espèces de colombidés liés à l’épandage de pesticides ayant pour principe actif l’imidaclopride.

Par ailleurs, dans une étude réalisée dans l’ouest de l’Allemagne, les auteurs ont analysé l’impact de la prédation du renard sur le Lapin de garenne, la Perdrix grise et le Lièvre d’Europe en travaillant sur des données acquises durant 41 ans (Knauer et al., 2010). Les auteurs concluent que l’amélioration des habitats serait bien plus efficace que la régulation des populations de renards pour restaurer les populations de lièvres, lapins et perdrix. Notons que ces gibiers, majoritairement issus d’élevages, n’ont pas des comportements d’animaux sauvages (animaux dépendant du nourrissage, faible distance de fuite…). De fait, l’incapacité des femelles à se reproduire explique pour beaucoup les échecs de repeuplement (Mayot, 2006).

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Éradication du renard pour favoriser des gibiers souvent inadaptés

L’exemple du Lapin de Garenne : bien que cette espèce puisse causer des dégâts importants aux activités maraîchères (il peut lui-même être classé « nuisible »), il a été et continue d’être lâché en dehors de son aire de répartition naturelle (bassin méditerranéen), parfois dans des habitats qui ne lui conviennent absolument pas. La « régulation » du Renard roux pour maintenir cette espèce afin qu’elle puisse être chassée relève de l’absurdité la plus totale !

L’exemple des faisans : les faisans lâchés en quantité sur le territoire national (14 millions par an) sont des espèces et sous-espèces exotiques (Faisan de Colchide, Faisan obscur, Faisan vénéré) introduites de façon répétée uniquement pour satisfaire des intérêts cynégétiques. Si on prend en compte l’impact de la grippe aviaire H5N8, qui contraint de nombreux éleveurs à se séparer de leurs élevages, il est légitime de s’interroger sur l’état sanitaire des oiseaux lâchés pour des intérêts cynégétiques.


3. Déconstruire les préjugés vis-à-vis du renard qui justifient son classement “ESOD”

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1. Une espèce qui rend de nombreux services

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Le renard a un rôle majeur dans l’écosystème qu’il est indispensable de connaître, reconnaître et préserver.

  • Il est un prédateur efficace des souris, rats, campagnols et tout ce qui pullule dans les champs.
  • Il s’occupe aussi des animaux malades, contagieux ou morts.
  • Il dissémine dans la nature des milliers de graines de fruits et baies qu’il a mangés.
  • Enfin, il joue un rôle majeur dans la régulation des petits rongeurs, parfois porteurs de tiques qui hébergent des bactéries du genre Borrelia à l’origine de la maladie de Lyme chez les humains. Il rend donc un grand service vétérinaire et sanitaire à l’espèce humaine.

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LE CAS DE LA MALADIE DE LYME

En France, le nombre de victimes de la maladie de Lyme est estimé à 27 000 nouveaux cas par an, chiffre qui progresse chaque année (Ministère de la santé, 2018). Lorsqu’elle est mal soignée, c’est une maladie qui peut devenir très grave. De nombreuses études à l’étranger ont souligné une corrélation entre l’augmentation des cas de maladie de Lyme et le déclin des prédateurs des rongeurs, notamment le renard (Levi et al., 2012) mais aussi le lynx (Ostfeld et al., 2018).

Une étude réalisée aux Pays-Bas dans 19 territoires forestiers et publiée dans la revue scientifique Proceedings of the Royal Society B: Biological Sciences étudie cette corrélation entre la présence de prédateurs et le nombre de tiques présents sur deux espèces de rongeurs, le Campagnol roussâtre et le Mulot sylvestre, qui sont d’importants réservoirs (hôtes) de Borrelia. Les résultats démontrent que le nombre de larves de tiques sur ces deux espèces de rongeurs diminue quand l’activité de prédation du renard roux et de la fouine augmente (ce qu’ils nomment l’ « effet cascade ») (Hofmeester et al., 2017).

Cela souligne une fois de plus l’importance des relations entre biodiversité, fonctions et services écosystémiques.


2. Une régulation naturelle des populations

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On ne trouve aucune information sur le nombre exact de renards en France, si ce n’est le nombre de renards tués par an (plus de 600 000 en France et environ 1 000 dans les Hautes-Alpes). Et pourtant, la question du risque de prolifération du renard revient régulièrement dans le débat.

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L’autorégulation des populations de renard

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Il existe une autorégulation des populations chez le renard. Différentes études ont montré que la taille des portées dépend entres autres de la disponibilité des ressources alimentaires (Englund, 1980 ; Gortázar et al., 2001). Par ailleurs, dans une population de renards et selon les contextes environnementaux (notamment les environnements pauvres en proies), toutes les femelles ne font pas de portées.

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Au-delà de la littérature scientifique, l’autorégulation des populations de renard peut se vérifier sur différents territoires où il n’est plus chassé.

  • En France, dans la ville de Strasbourg et dans les Réserves Naturelle Rhénanes (plusieurs milliers d’hectares), le renard n’est plus chassé depuis plus de 30 ans.
  • Dans le canton de Genève, l’interdiction de la chasse a été votée il y a 44 ans. Dans ces contextes, les populations de renards n’ont jamais explosé et les populations de lièvres sont denses (une étude rapporte une densité de lièvres de 15 individus au km2 dans le canton de Genèvre (Dandliker, 2015).
  • En 2017, c’est le Luxembourg qui a pris la décision de fermer la chasse aux renards. Le premier retour d’expérience ne fait mention d’aucune augmentation de la population. Il révèle par contre un sexe-ratio équilibré, des animaux en bonne santé et un pourcentage de charges parasitaires transmissibles à l’homme moins élevé que dans certains départements de l’Est de la France (Gouvernement du Grand-Duché du Luxembourg, 2017).

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Comme l’écrit Jean-Steve MEIA (2003) : « il n’existe pas de raison de penser que les renards sont en surnombre et il est faux de croire que l’homme doit réguler la nature. Elle y parvient seule. Tant qu’il y a de la place pour une espèce dans un milieu, ses effectifs se développent. Lorsque la capacité du milieu est atteinte, le nombre d’individus cesse de croître. »


Les prédateurs du renard

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La régulation des espèces animales et végétales est naturellement organisée dans les différents écosystèmes : c’est notamment le rôle de la chaîne alimentaire, qui caractérise la suite de relations alimentaires existant entre les êtres vivants. Cette chaîne fonctionne harmonieusement tant que les populations de ses différents maillons sont équilibrées.

Malheureusement, les activités humaines en perturbent régulièrement les rouages. Ainsi au cours des siècles, l’homme a participé à la disparition progressive de la plupart des prédateurs du renard : l’ours, le loup, le lynx (appelé « loup cervier » sous la révolution), l’Aigle royal.

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Le renard se retrouve alors au sommet de la pyramide des super prédateurs : ce sont donc les poisons, les pièges, les fusils qui prennent la relève…

« Le renard n’a plus aucun ennemi naturel. Le voilà sacré « plus gros carnivore sauvage » de France. Tout cela, grâce à qui : à ceux précisément qui se plaignent aujourd’hui du trop grand nombre de renards. Amusant, non ? » (Pierre DEOM, La Hulotte n°33/34).

Cet article a été écrit en 1980, mais le statut du renard n’a pas évolué depuis et le lynx, le loup et l’ours ont encore mauvaise réputation en 2021…


3. Le renard : porteur de maladies ?

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Lorsqu’une population animale ou végétale est trop concentrée, elle est rapidement victime de microbes, bactéries et virus, qui participent à la régulation. C’est ainsi que le renard se retrouve épinglé comme vecteur de maladies.

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L’apparition de la rage, tout d’abord, transmissible aux animaux et à l’homme, a été à l’origine d’une lutte acharnée contre le renard. Or les poisons, gaz, déterrages, pièges, chasses ne sont parvenus à éradiquer ni le renard, ni le virus. Bien que le vaccin soit mis au point par Louis PASTEUR en 1885, ce n’est que dans les années 1986 qu’on a commencé à vacciner les renards, grâce à des appâts alimentaires lancés par hélicoptères. La prophylaxie a été bien plus efficace que la tentative d’éradication du renard, depuis 2001, il n’y a plus aucun cas de rage en France. Malheureusement, en 2021, dans les milieux cynégétiques, on évoque encore la chasse au renard comme argument pour la lutte contre le virus rabique !

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La gale sarcoptique est une autre maladie qui touche le renard (Carricondo-Sanchez et al., 2017) mais également d’autres espèces animales. Il s’agit d’une dermatose parasitaire liée à un acarien (le Sarcoptes scabiei). Des épidémies de gale sont bien documentées dans la littérature et elles peuvent se traduire par une très forte diminution des populations de renard (Henriksen et al., 1993). Dans ce cadre, il est légitime de s’interroger sur une possible transmission du parasite à l’homme. À ce sujet, l’OFB, via le réseau SAGIR, précise que « le parasite n’infeste pas l’homme, mais il peut y avoir une réaction allergique (qui régresse rapidement) lors d’un contact avec un animal très infesté. Il n’y a donc pas de risque sanitaire majeur pour l’homme par rapport à cette maladie, et ce motif ne peut donc pas être invoqué pour justifier la destruction des renards. »

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L’échinococcose alvéolaire est aujourd’hui un argument largement utilisé pour maintenir le renard dans la liste des nuisibles. Il s’agit d’une maladie grave dont le renard est un vecteur potentiel, comme certains animaux domestiques comme les chiens et plus rarement les chats. Cette maladie est due au parasite Echinococcus multilocularis, un cestode de la famille des ténias (Taeniidae). Pour réaliser son cycle, ce parasite a besoin de deux hôtes, un « hôte intermédiaire » (certaines espèces de rongeurs) et un « hôte définitif » (un canidé ou plus rarement un chat). En Europe, le renard fait partie des « hôtes définitifs ». Les oeufs du parasite sont excrétés avec les fèces de « l’hôte définitif » et l’homme peut finalement les ingérer, soit en consommant de la nourriture contaminée (via par exemple des cueillettes dans la nature, voire dans le jardin), soit au contact direct d’animaux porteurs (manipulation de renards ou contacts avec le chat ou chien domestique). Dans le cycle du parasite, l’homme constitue ce que l’on appelle une « impasse parasitaire » puisqu’il ne peut transmettre le parasite.

Les cas d’échinococcose alvéolaire demeurent rares puisque l’on recense en moyenne une trentaine de nouveaux cas humains par an sur le territoire national. Toutefois, il s’agit d’une maladie grave qui se déclare parfois des années après la contamination. Des recherches sont en cours et elles permettront sous peu d’éviter de tuer des animaux pour mesurer la prévalence de la maladie (Umhang et al., 2016).

Pour justifier l’acharnement contre le Renard roux, le motif est donc tout trouvé : détruire l’espèce permet de limiter l’échinococcose alvéolaire. Dans certains départements, les services de l’État autorisent d’ailleurs la destruction de l’espèce. On ne peut que s’en étonner, puisque le Guide pratique du classement des espèces en tant qu’espèce « nuisible », édité par le Ministère de l’Écologie en juin 2014, précise que « bien que le Renard roux puisse être effectivement porteur de cette maladie, les processus épidémiologiques sont tels qu’il n’est pas justifié sur un plan scientifique d’invoquer cette maladie pour le classer nuisible ».

Comment se fait-il qu’un service de l’État ne tienne pas compte des recommandations provenant du ministère en charge de l’écologie ?

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L’histoire de la rage notamment nous a prouvé que la réduction des populations de renard n’est pas une solution efficace pour lutter contre les maladies.

Il apparaît que « chasser le renard affecte principalement la structure de la population en induisant une augmentation des juvéniles. Ces derniers sont connus pour porter jusqu’à 85% de la biomasse d’Echinococcus multilocularis dans la population vulpine. Ainsi, la régulation des renards pourrait avoir des effets contreproductifs sur la prévention de la zoonose et pourrait même favoriser sa transmission. » (Déplazes et al., 2004).

Par ailleurs, lors d’un colloque international sur l’échinococcose, il ressort la « préconisation aux gestionnaires de considérer des méthodes alternatives telles que le recours aux appâts anthelmintiques qui ont démontré ailleurs leur efficacité pour lutter contre l’échinococcose alvéolaire. » (Comte et al., 2017).

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Il existe des actions permettant de réduire et de prévenir cette maladie (Craig et al., 2017). Ces mesures de prophylaxie concernent principalement nos animaux domestiques et les aliments que nous récoltons dans la nature, dans les potagers. Ainsi, la vermification des chats et des chiens, l’adoption de certains comportements hygiéniques avec les animaux domestiques (ne passe se laisser lécher le visage, ne pas porter ses doigts à la bouche après contact, éviter les bisous, etc.), bien laver les aliments, consommer de préférence des aliments cuits, clôturer son potager, etc. sont quelques gestes simples mais efficaces.

Par ailleurs, les progrès de la médecine humaine sont importants depuis les années 1980 et ont apporté des évolutions dans les traitements (la chimiothérapie a remplacé la chirurgie, toujours délicate) comme pour le dépistage.

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En ce qui concerne la toxoplasmose, c’est le chat (les félidés) qui multiplient le parasite tandis que la source majeure de contamination humaine passe par la viande de ruminants pas assez cuite. Les canidés, dont le renard, ne jouent aucun rôle. A noter que la toxoplasmose, ou plutôt les œufs du parasite, sont une pollution biologique majeure de l’environnement due aux déjections félines qui expliquent la présence de la maladie chez des mammifères marins et aquatiques…

Sur ce sujet, consulter également la plateforme ESA :   https://www.plateforme-esa.fr/?page=1

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Il s’agit de se méfier aussi de l’argument du rôle du renard dans la propagation de la néosporose, dans les régions où la maladie sévit. Les chasseurs en font également un argument, tout aussi faux que pour la toxoplasmose, puisque ce sont les chiens qui entretiennent la maladie qui est transmise aux bovins par leurs déjections, les renards n’ont aucun rôle la dedans!

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Nous avons échangé sur ces questions avec François MOUTOU et Marc ARTOIS. Résumons ainsi :

souvenons-nous de l’adage « qui veut tuer son chien l’accuse de la rage ». Il en est de même pour le renard que l’on accuse de tous les maux, afin de justifier le plaisir de pouvoir le chasser par tous les moyens et en toutes saisons !

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Pour en savoir plus, consulter : http://conseils-veto.com/echinococcose-dangeret-prevention-homme-chien-et-chat/


4. Revoir le statut du renard : l’exemple du Doubs

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Le Collectif Renard Doubs (qui regroupe 40 structures liées à la protection de la nature, soit 19 247 personnes) milite pour que soient enfin reconnus les éléments scientifiques en faveur du Renard roux et que cesse l’acharnement inutile contre cette espèce.

Cette mobilisation a permis d’ouvrir un dialogue et de remettre en question les pratiques cynégétiques et agricoles. Avec la participation de nombreux agriculteurs (245 exploitations agricoles ont apporté leur soutien) et des chasseurs du territoire, le collectif a obtenu un retrait du renard de la liste des ESOD dans le département.

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Par arrêté préfectoral en date du 6 novembre 2019 (prolongé en juillet 2020), le renard a été retiré de la catégorie ESOD dans 117 communes du Doubs (soit 1/3 de la surface totale du département).

Il reste cependant chassable (durant une période arrêtée dans chaque département). Par ailleurs, une étude décennale, l’étude CARELI (Campagnol-Renard-Lièvre) a été lancée en 2018 pour un suivi de l’évolution des populations de campagnol, renard et lièvre lorsque le renard n’est pas chassé. Pour la bonne réalisation de cette étude, le renard est donc actuellement entièrement protégé dans 30 communes.

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